Psychologie clinique : CM n°9

L'adolescence

L'enfant sort de la période de latence pour aborder l'adolescence, ou plutôt la préadolescence où le processus pubertaire se met en place. L'adolescence est un stade important du développement de l'individu où l'on constate un avant et un après. Elle apporte des transformations biologiques, physiologiques et les sujets sont contraints de faire face à ces changements imposés.

Le processus physiologique induit des transformations corporelles qui sont ensuite définitives. Elles sont d'autant plus importantes que l'enfant entre dans une apparence d'adulte et perd l'apparence de l'enfance, asexué (il n'y a plus possibilité d'un maintien d'une bisexualité après l'adolescence). L'enfant a donc besoin de s'inscrire dans une identité sexuelle fixe. Le monde extérieur les voit comme des sujets désirables ce qui entraîne le sentiment d'être exposé à la vue des autres. Ces changement s'accompagnent du fait que le sujet lui-même a du désir à l'égard des autres. L'adolescent se tourne vers les autres où les relations sont différentes de toutes les relations vécues jusqu'à présent.

Les relations que l'adolescent entretient avec les parents et l'entourage subissent aussi des changements. Alors qu'on avait avant une relation d'enfant à adulte, avec l'adolescence la conscience chez l'adolescent, comme chez les parents, qu'il devient un jeune adulte capable d'entrer dans des relations amoureuses et sexuelles, d'avoir des enfants, amène à un changement de relation. Ces changements peuvent être une gène qui s'installe avec les parents : les parents deviennent encombrants (ensemble d'éléments comme être trop près des parents).
En même temps, les parents doivent faire face à quelque chose qu'ils ont aussi élaboré psychiquement. L'illusion que l'enfant restera toujours enfant se transforme en peu de temps en nécessité des parents de faire le "deuil" de l'enfant, élevée ensuite en perspective d'une séparation qui se met en place.
L'adolescence introduit donc des bouleversements chez l'adolescent comme chez les parents. Il peut y avoir parfois résurgence chez les parents de leur propre adolescence par exemple.

La puberté est un concept physiologique. C'est une étape qui ouvre la possibilité de fécondation et entraîne un certain nombre de modifications physiologiques comme le développement de la poitrine ou de la masse musculaire. La différenciation homme / femme devient ainsi très nette.
Ces changements peuvent être vécus de manière positive par l'adolescent qui attendait ça, ou de manière négative, difficile (la mue chez les hommes par exemple) car il a le sentiment de ne pas avoir le contrôle de ce que se passe dans son corps. C'est un sentiment d'étrangeté qui saisit l'adolescent. Il se forme souvent la dysmorphophobie qui est une crainte que le corps ne convient pas. Il peut aussi y avoir complexe si le développement pubertaire est tardif car il pousse l'adolescent à se questionner sur sa normalité.
L'impact de ces transformations sur la psychisme est considérable (changement d'humeur, d'état psychique). C'est un moyen de sortir de la relations avec les parents et d'investir un tiers. L'adolescent se tourne vers un tiers mais non de manière stable.

L'évolution va dans le sens d'une précocité de l'âge de la puberté, ce qui introduit un écart entre ce qui se passe dans le corps et la maturité psychique de l'adolescent. L'adolescence est complexe car il est difficile d'y penser sans les données physiologiques, sans les données sociales, sans les travail psychologique mis en jeu.

Sous la pression de ces changements pubertaires, se met en place une élaboration psychique qui devrait amener les sujet à affronter psychiquement quelques problèmes fondamentaux qui vont ressurgir au cours de cette période. L'issue de cette élaboration psychique va permettre l'entrée dans la phase "pré-adulte" où l'individu prend en charge ses désirs, ses projets. L'issue de l'adolescence introduit aussi la rencontre avec l'autre : capacité de se dégager des attachements antérieurs pour envisager une relation avec un autre, conçu comme différent de soi et aimé comme tel.

La problématique à affronter lors de l'adolescence est l'élaboration de la réactivation des pulsions qui est déstabilisante. Il y a nécessité d'élaborer ces modifications psychiquement, réactivation du conflit oedipien amenant une nécessité de passer par l'agir, de prendre de la distance, pour faire face à ce désarroi psychique quand l'individu se retrouve attaché aux parents (nécessité de s'en dégager).
Il n'y a pas d'adolescence sans "crise" mais il ne faut pas banaliser ce terme de "crise". C'est une crise dans sa dimension normale, luttative, qui implique un travail psychique mais à différencier de manifestations d'ordre pathologique. Nombre de troubles apparaissent à cette période (anorexie par exemple), les manifestations de malaises peuvent passer par une tentative de suicide par exemple. Il faut donc être attentif mais en même temps ne pas être dramatisé par ce qui se passe. Plus on intervient tôt, moins l'adolescent rentrera dans une symptomatique pathologique.

La problématique oedipienne à partir de la réactivation pulsionnelle pose un problème narcissique : l'adolescent va se recentrer sur soi et va s'intéresser à lui-même. Il va devoir faire face à ses préoccupations face aux changements qu'il subit, aux questions concernant sa capacité de séduction. L'adolescent met en travail l'image de soi, doit changer sa représentation de lui-même, de son propre corps. Il doit intégrer ce nouveau corps, ce qui est gérable s'il a des assises narcissiques de bonne qualité mais peut être difficile en cas de vulnérabilité narcissique.
L'adolescence est donc vécue comme une épreuve qui comprend le sentiment de sa propre identité bien intégrée et des identifications aux autres. Si ce n'est pas le cas, il y a rupture dans le processus de développement qui déclenche des troubles pathologiques graves.

L'accent est mis sur le travail psychique d'intégrité comme corps sexué. Cette intégration permet au sujet de se tourner vers un autre, un objet d'amour nouveau et différent de ce qu'il aura connu, ce qui induit une problématique de séparation. En effet, l'entrée en adolescence induit la perspective de se séparer de ses premiers objets d'amour, oedipiens. C'est une phase au cours de laquelle il faut renoncer à l'attache oedipienne pour une attache désexualisée des parents. Ce travail de séparation entre donc dans la réalité, au niveau intrapsychique.

 

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